L'homme, les sciences et la société - Section II

Franz Joseph Gall's Schädellehre in August von Kotzebue's comedy Die Organe des Gehirns : questioning and satirising the (pseudo-)scientific idea of phrenology

DOI: 10.17457/RIL/11_2017.MUR

Maria-Christina Mur (Université de Bologne)

Franz Joseph Gall's Schädellehre in August von Kotzebue's comedy Die Organe des Gehirns : questioning and satirising the (pseudo-)scientific idea of phrenology

Entre 1805 et 1808 Franz Joseph Gall, médecin et anatomiste, voyageait en Europe centrale avec ses conférences sur l’organologie et la cranioscopie. Basé sur ses conférences et ses recherches précédentes, Gall est devenu le fondateur de la (pseudo)science, plus tard nommée, phrénologie. En 1806, August von Kotzebue, l’un des dramaturges allemands les plus célèbres et influents du XVIIIe siècle, présente une comédie intitulée Die Organe des Gehirns. Herr von Rückenmark, le personnage principal, est obnubilé par l'idée de lire dans les crânes des gens. Kotzebue satirise l’approche phrénologique de son personnage principal et ridiculise les résultats obtenus à travers la phrénologie. Cet article vise à analyser la nature scientifique de la phrénologie, sa réception critique et son influence sur la culture aux XVIIIe et XIXe siècles. L’analyse textuelle de l'une des comédies de Kotzebue moins connue devrait mettre l'accent sur la popularité de la théorie de Gall dans la société et sur l’ambiguïté de sa réception.
Mots-clés : Franz Joseph Gall, August von Kotzebue, phrénologie, théories pseudoscientifiques, satire.

Between 1805 and 1808 Franz Joseph Gall, physician and anatomist, travelled across Central Europe giving lectures on organology and cranioscopy. Based on these lectures and his previous research, Gall became the founder of the (pseudo-)science, later named, phrenology. In 1806, August von Kotzebue, one of the most famous and influential German playwrights of the eighteenth century, presented a comedy entitled Die Organe des Gehirns. Herr von Rückenmark, the main character, is obsessed with the idea of reading people’s skulls. Kotzebue satirises the phrenological approach of his main character and ridicules the results gained from it. This article aims to investigate the scientific nature of phrenology, its critical reception and its influence on culture in the eighteenth and nineteenth centuries. The text analysis of one of the lesser-known comedies by Kotzebue aims to emphasise the popularity of Gall’s theory in society and the ambiguity in its reception.
Keywords : Franz Joseph Gall, August von Kotzebue, phrenology, pseudoscientific theories, satire.

 

Le Choléra dans l'oeuvre de Maupassant (1884-1887) : trompe-l'oeil, fantastique et microbiologie

DOI: 10.17457/RIL/11_2017.PEL

Roberta Pelagalli (Université de Bologne) 

Le Choléra dans l'oeuvre de Maupassant (1884-1887) : trompe-l'oeil, fantastique et microbiologie

Guy de Maupassant s’avère doté de solides connaissances en ce qui concerne la science médicale de son époque. Il crée son fantastique jouant à la fois avec les nouveautés et les limites que celle-ci lui offre : il superpose intentionnellement des pathologies différentes, en les projetant dans des mythes passés ou futurs. La nature microscopique de l’agent pathogène officiellement découvert par Robert Koch en 1884 se traduit, en termes littéraires, par la légèreté d’un voyageur invisible à l’allure surnaturelle, le choléra pouvant alors se confondre avec d’autres maladies infectieuses. Ces caractéristiques rendent complexe et intéressante l’interprétation des oeuvres de Maupassant au sujet du mal asiatique, dans un moment très délicat de l’histoire de la maladie au tournant du siècle, après la découverte du bacille virgule responsable de la contagion, mais avant la mise au point du vaccin. 
Mots-clés : choléra, trompe-l’oeil, fantastique, microbiologie, Horla.

Guy de Maupassant gives evidence of his deep knowledge of the medical science of his time. He creates his own fantasy genre playing both with the innovations it allows and its boundaries. He deliberately overlaps different pathologies referring them to past or future myths. Thus cholera can merge with other infections and its microscopic pathogen (officially discovered by Robert Koch in 1884) turns into a fictitious supernatural being. As a result of this practice, the interpretation of Maupassant’s works on cholera acquire complexity and interest. Even the historical and cultural context is evidently intricate. At the end of the 19th century the bacillus had been identified, but not its antidote.
Keywords : cholera, trompe-l’oeil, fantastic, microbiology, Horla.

Baci velenosi? Sul contagio nella letteratura italiana del secondo Ottocento

DOI: 10.17457/RIL/11_2017.COM

Edwige Comoy-Fusaro (Université Nice Sophia Antipolis) 

Baci velenosi? Sul contagio nella letteratura italiana del secondo Ottocento

Entre 1860 et 1900, des bouleversements phénoménaux ont lieu dans les idées. Une idée gagne beaucoup de terrain : celle de la contagion. Héritière de la théorie des miasmes et du mesmérisme, elle bénéficie du développement des études sur l’hystérie et de l’émergence de la sociologie. Avec les progrès de la bactériologie, s’ajoutent aux phénomènes de suggestion et d’imitation – supposés ou avérés – les contaminations infectieuses. Tout cela produit un vaste sentiment de peur. Néanmoins, dans la littérature, bactéries et virus se voient assigner une fonction métaphorique : ils représentent les hantises des personnages masculins. Derrière la peur du baiser venimeux se cache la peur des femmes, elle-même symptomatique d’une évolution de plus en plus marquée à mesure que la fin du siècle approche : l’inversion des rôles entre sexe (supposé) fort et sexe (supposé) faible.
Mots-clés : contagion, Scapigliatura, Capuana, Boito, Tarchetti.

Between 1860 and 1900, phenomenal upheavals took place in ideas. An idea gains much ground: that of contagion. Inherited from the theory of miasma and mesmerism, this idea benefited from the development of studies on hysteria and the emergence of sociology. With the progress of bacteriology, there are added to the phenomena of suggestion and imitation - supposed or proven - infectious contamination. New theories produce a vast sense of fear. Nevertheless, in the literature, bacteria and viruses are assigned a metaphorical function: they represent the hauntings of male characters. The fear of the venomous kiss hide the fear of women, itself symptomatic of an evolution more and more marked as the end of the century approaches: the inversion of roles between (supposedly) strong sex and (supposedly) weak sex.
Keywords : contagion, Scapigliatura, Capuana, Boito, Tarchetti.

 

La biologie romanesque ou comment dénoncer une injustice

DOI: 10.17457/RIL/11_2017.ADH

Mouad Adham (Université Hassan II de Casablanca)

La biologie romanesque ou comment dénoncer une injustice 

La science et la fiction ne tracent pas de frontières nettes dans l’écriture proustienne, c’est plutôt une correspondance implicite qui se tisse entre ces deux domaines apparemment contradictoires. À la recherche du temps perdu donne une parfaite illustration de cet échange qui sert une cause morale et un engagement social et politique : le narrateur homodiégétique de ce roman utilise un discours scientifique pour expliquer et légitimer une nature humaine difficilement acceptable jusqu’ici. Le recours de la Recherche aux analogies figurées s’attachant au règne animal par exemple assimile le mode de vie humain à celui des animaux afin d’expliquer ce qui est incompréhensible et irrationnel dans le comportement humain. La concomitance des discours analogique et scientifique est dictée par une contrainte sociale et une autocensure. Les vérités révélées par l’analogie biologiste permettent au narrateur de donner son point de vue sur ce qui est dit au sens propre mais d’une manière indirecte, implicite voire même inconsciente. En effet, le lecteur de la Recherche est convaincu à la fin du roman que l’homosexualité du baron de Charlus, un des personnages principaux du roman, et le saphisme d’Albertine, l’amante du narrateur, sont des comportements tout à fait naturels et représentent une identité sexuelle. L’évidence de cette vérité parait une révélation immorale et va à l’encontre de ce que pense la majorité de la société de l’époque, mais corrobore parfaitement la vie de l’auteur. Le lecteur connaisseur de la biographie de Marcel Proust déduit rapidement que la justification scientifique du mode de vie homosexuel reflète la pensée cachée de l’auteur qui ne peut révéler son vrai engagement que via des manières dérobées.
Mots-clés : analogie, science, sens figuré, sens propre, biologie.

Science and fiction do not draw clear borders in Proust’s writing, there is rather an implicit correspondence between these two seemingly contradictory domains. In Search of Lost Time gives a perfect illustration of this exchange that serves a moral cause and a social and political commitment: the homodiegetic narrator of this novel uses scientific discourse to explain and legitimate a human nature still considered as unacceptable at that time. For instance, in this work the use of figurative analogies related to the animal kingdom assimilates the human way of life to that of animals to explain what is incomprehensible and irrational in human behavior. The concomitance of analogical and scientific discourses is dictated by social constraint and selfcensorship. The truths revealed by the biological analogy allow the narrator to give his point of view on what is said literally, yet indirectly, implicitly or even unconsciously. In fact, at the end of the novel the reader is convinced that the homosexuality of both the Baron de Charlus, one of the main characters of the novel, and the lesbianism of Albertine, the narrator’s lover, are natural behaviors and a representation of sexual identity. The obviousness of this truth appears to be an immoral revelation which goes against what the majority of society thought at that time, but perfectly adheres to the author’s life. The reader who knows Marcel Proust's biography quickly deduces that the scientific justification of the homosexual way of life reflects the hidden thought of the author who can only reveal his true commitment in secret ways.
Keywords : analogy, science, figurative sense, proper sense, biology.

 

La dévitalisation dans les textes de Michel Houellebecq : de l'orgie de science à l'éclipse du sens

DOI: 10.17457/RIL/11_2017.VIE

Gilles Viennot (Université de l'Arkansas) 

La dévitalisation dans les textes de Michel Houellebecq : de l'orgie de science à l'éclipse du sens

Cet article, centré sur le rapport entre Michel Houellebecq et la science, étudie les liens entre la science, la modernité et la postmodernité. En s’attardant sur Spengler, figure tutélaire de Houellebecq, cette contribution s’attarde sur la validité de la littérature pour mettre en perspective l’impact social et culturel de la science à travers les romans de Houellebecq, qui se penche sur la dégradation du monde impulsée par la science, sur la dévitalisation, opposée à l’énergie diabolique, et sur la soumission croissante de l’homme à la machine, de la honte de l’homme envers sa nature organique, et de leurs conséquences délétères. Avant sa conclusion, cet article décrypte une scène de La carte et le territoire impliquant Steve Jobs and Bill Gates.
Mots-clés : dévitalisation, post-modernité, science, simulacra, technologie.

This paper is focused on the relationship between Michel Houellebecq’s work and science and therefore deals with the connection between science, modernity and postmodernity. By focusing first of all on Spengler, a protective figure for Houellebecq, this text dwells on the validity of literature as a means to put into perspective the social and cultural impact of science, the world’s degradation caused by science, according to Houellebecq, “devitalization” and the diabolical energy, and the increasing human submission to the machine and the subsequent shame for human organic nature as well as on their deleterious consequences. Before its conclusion, this paper deciphers a scene from The Map and the Territory involving Steve Jobs and Bill Gates.
Keywords : devitalization, postmodernity, science, simulacrum, technology.