Sommaire et Résumés

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Version papier : Enrico Monti, Fabio Regattin (éds.), « Traduction et tradition ? Parcours dans le polysytème littéraire européen / Traduzione tradizione ? Paths in the European Literary Polysystem », Ri.L.Un.E. – Revue des Littératures de l’Union Européenne, n° 4, juil. 2006, Bologna, CLUEB, 2008.

Translating the “West”: The Position of Translated Western Literature within the Turkish Literary Polysystem

Özlem Berk (Mugla Üniversitesi, Türkiye)

Translating the “West”: The Position of Translated Western Literature within the Turkish Literary Polysystem

La traduction de textes littéraires écrits en langues occidentales a joué un rôle important dans le processus de modernisation de la Turquie, surtout en ce qui concerne l’occidentalisation de cette nation à partir du milieu du XIXe siècle. Cet essai étudie la position qu’occupent les littératures occidentales en traduction au sein du polysystème littéraire de la Turquie. Une analyse descriptive et historique des traductions de textes littéraires européens fait valoir que de telles traductions ont non seulement enrichi la littérature turque par un apport de nouveaux genres, modèles, et sujets littéraires, contribuant ainsi à l’épanouissement du langage et dotant la Turquie d’une toute nouvelle littérature, mais ont aussi profondément marqué le polysystème socioculturel et surtout le processus de construction de l’identité nationale.
Mots-clés : Turquie, traduction littéraire, occidentalisation, modernisation, identité, politiques culturelles

Création et diversification du canon littéraire bulgare (XIXe – XXe siècles): entre tradition nationale et innovation par la traduction

Marie Vrinat-Nikolov, Krassimira Tchilingirova (INALCO, Paris, France)

Création et diversification du canon littéraire bulgare (XIXe – XXe siècles): entre tradition nationale et innovation par la traduction

Cet article s’intéresse à la position occupée par la littérature traduite au sein du système littéraire bulgare, aux modalités concrètes de transfert culturel des littératures européennes à trois moments clef de l’histoire littéraire bulgare: sous le Réveil national, au début du XXe siècle et sous le régime communiste. Sont évoqués les grands débats sur la place à accorder à la littérature traduite au sein du polysystème littéraire national bulgare en train de se cristalliser, le choix des textes et des auteurs à traduire, les pratiques traduisantes découlant du projet des traducteurs et de leur conception du rôle de la traduction, les modalités spécifiques de «l’épreuve de l’étranger» (ouverture et perméabilité a d’autres cultures, foisonnement des traductions et changement de perspective dans l’activité traduisante).
Mots-clés : canon littéraire, Réalisme socialiste, bulgarisation, ouverture, européanisation

¿Traduzione Tradizione? El polisistema literario español durante la dictadura franquista: la censura

Cristina Gómez Castro (Universidad de Léon, España)

¿Traduzione Tradizione? El polisistema literario español durante la dictadura franquista: la censura

À plusieurs époques de l’histoire littéraire espagnole, la traduction a facilité le passage de traditions et de courants littéraires entre l’espagnol et d’autres langues, contribuant par cela à innover et à modifier de manière substantielle la culture nationale. Cet essai explore la position que les ouvrages traduits pendant la dictature franquiste (1939-1975) occupaient dans le polysystème littéraire de ces années, une position centrale que jouait un rôle important dans le développement de la tradition littéraire d’Espagne. La formule «traduction tradition» se montre dans ce cas particulier comme une formule véridique, concernant l’importation e l’adaptation successive du matériel à l’idéologie franquiste en vigueur.
Mots-clés : polysystème littéraire, franquisme, traduction, pseudotraduction, censure

When the Iron Curtain Falls: Scandinavian-Czech Translation 1890-1950

Ondrej Vimr (Univerzita Karlova, Praha, Ceská Republika)

When the Iron Curtain Falls: Scandinavian-Czech Translation 1890-1950

Traducteur des langues scandinaves au tchèque, Hugo Kosterka (1867-1956) peut être considéré un traducteur emblématique et exceptionnel de la période constitutive de la traduction scandinave-tchèque. En suivant ses activités de traducteur, d’éditeur et d’agent culturel sur une période de 60 ans (1890-1950), c’est-à-dire à la fin du siècle, pendant l’entre-deux-guerres et à la veille de l'installation du régime communiste, on remarque des transformations du contexte littéraire, social et politique de la traduction en Bohême. Le traducteur était forcé de s’adapter continuellement au milieu contemporain, où s’opéraient des changements concernant la professionnalisation, la normativisation et la politisation de la traduction.
Mots-clés : histoire de la traduction, normativisation, professionnalisation, politisation, traduction en tchèque, Scandinavie.

Les jeux de l’écriture ou les problèmes culturels à travers la traduction

Maria Orphanidou-Fréris (Université Aristote, Thessalonique)

Les jeux de l’écriture ou les problèmes culturels à travers la traduction

Partant du principe que la traduction nous donne souvent une notion partielle du contexte source, partageant la conception que traduire n’est pas bel et bien un savoir professionnel, mais aussi et avant tout une activité culturelle, voire littéraire, nous montrons, en particulier à partir des conceptions de Meschonnic, comment le recueil de nouvelles Les Passantes de l’écrivain française Sylviane Roche – qui vit et travaille à Lausanne, se considérant francophone romande – a été rendu en grec moderne. Dans cette pratique, en particulier littéraire, le processus traductif vise avant tout à adapter – pour être compris – le contexte de la langue source à la langue cible. C’est pourquoi le traducteur «imagine» souvent des tournures, des styles, des images autres que ceux du contexte du départ. Ainsi, le lecteur du contexte d’arrivée reçoit un message «infidèle» selon les uns, «trahi» selon les autres, à coup sûr «différent». Et l’image qu’il perçoit du code langagier traduit est une image, si non falsifiée, du moins «inventée», pour des raisons de compréhension. D’où le besoin d’envisager la traduction non pas comme une simple opération de transcodage d’éléments ou de transfert de sens équivalents, mais comme une forme d’acte langagier dont les variétés des mécanismes discursifs qui le structurent peuvent se restituer dans leur totalité.
Mots-clés : traduction littéraire – rythme – adaptation – équivalence – mécanisme discursif.

Around the Continent in 99 Exercises: Tracking the Movements of the Exercices de style

Carol O’Sullivan, (University of Portsmouth, UK)

Around the Continent in 99 Exercises: Tracking the Movements of the Exercices de style

Cette étude analyse les voyages qu’ont fait les Exercices de style (1947) de Raymond Queneau en traduction anglaise et italienne. Des adaptations et des versions dans d’autres langues et d’autres médias témoignent de l’importance (ou non) du texte dans les polysystèmes d’arrivée. Cet article combine une approche textuelle à une approche systémique pour chercher à expliquer l’extraordinaire succès du livre en Italie, l'accueil plus modéré reçu en Angleterre et la réponse, déjà plus chaleureuse, connue aux Etats-Unis – des phénomènes que cet article cherche davantage à éclaircir. Le texte innovateur de Queneau nous montre les routes que tout texte prend, une fois traduit et adapté. Les traductions peuvent, à leur tour, emprunter des chemins détournés et accumuler une nouvelle énergie avant de retourner, en les renouvelant, à la langue et à la culture d’origine.
Mots-clés : Raymond Queneau; Exercices de style; traduction; Stefano Benni; bande dessinée

The Translations of H.C. Andersen’s Fairy Tales on the European Literary Scene

Gilles Quentel (Uniwersytet Gdanski, Polska)

The Translations of H.C. Andersen’s Fairy Tales on the European Literary Scene

Cet exposé propose un aperçu de la situation des traductions des contes d’Andersen dans plusieurs langues d’Europe (français, espagnol, norvégien, polonais ainsi que les langues celtiques). Il examine d’une part les stratégies de traductions retenues sous un angle socio-culturel et de l’autre la situation de ces traductions sur les scènes littéraires de ces pays. Enfin, il s’attarde sur le cas de certaines langues dans lesquelles les contes n’ont que peu été traduits, et cherche les raisons de cette absence. Il a en outre semblé intéressant d’examiner la question à la lumière de la théorie du polysystème d’Itamar Even-Zohar.
Mots-clés : traduction, Andersen, polysystème, contes, Europe

L’intraduisible en question: l’étude de la saudade

Adelino Braz (Université de Paris I, Panthéon-Sorbonne, France)

L’intraduisible en question: l’étude de la saudade

L’existence d’expressions singulières, particulières à une culture, pose la question de savoir comment est-il possible de transposer un tel fait linguistique dans une réalité au sein de laquelle il n’existe pas. Notre réflexion met ainsi en jeu le statut même de l’intraduisible à travers l’exemple de la saudade, terme réputé intraduisible, caractéristique de l’identité portugaise, en montrant que cet intraduisible se présente à part entière comme un élément constituant de l’expérience de la traduction.
Mots-clés : saudade, Pessoa, traduction, culture

Norms, Difference, and the Translator: Or, How to Reproduce Double Difference

Massimiliano Morini (Università degli Studi di Udine, Italia)

Norms, Difference, and the Translator: Or, How to Reproduce Double Difference

Malgré l’ancienne et riche tradition littéraire de l’Ecosse, les auteurs écossais ont été ignorés où présentés comme britanniques, tant en Grande Bretagne comme à l’étranger. En Italie on a une connaissance des littératures de l’Australie, de l’Irlande où de l’Inde, mais les écrivains écossais sont rarement reconnus en tant que tels. Cela est dû aussi à la difficulté de rendre la différence entre l’anglais et le Scots souvent employé par les auteurs écossais: les traducteurs italiens, soit volontairement, soit pour éviter la censure des éditeurs et des critiques, rendent habituellement le Scots (quand ils le font) avec une version de l’italien non-standard et dans un registre bas. Cet article propose une stratégie plus inventive – exemplifiée par la traduction de Sunset Song de Lewis Grassic Gibbon faite par l’auteur – et observe aussi les réactions que l’emploi de cette stratégie a produit dans le système italien.
Mots-clés : traduction, normes, langue anglaise, langue écossaise, Lewis Grassic Gibbon

La traduction littéraire: source d’enrichissement de la langue d’accueil

Françoise Wuilmart (ISTI, Bruxelles, Belgique)

La traduction littéraire: source d’enrichissement de la langue d’accueil

Dans tout texte littéraire, la langue véhicule un certain “message”, non seulement par le biais de son lexique, mais aussi de ses phonèmes et de sa mélodie. Cette globalité n’est pas restituable dans une autre langue, qui fonctionne selon un système propre.
Dans un échange optimal, chaque locuteur pourrait s’exprimer dans sa propre langue, après avoir acquis une connaissance passive de la langue de l’Autre, ce qui optimaliserait la compréhension réciproque.
La traduction reste incontournable, car on ne peut apprendre toutes les langues. Deux options s’offrent au traducteur: celle du «cibliste» et celle du «sourcier».
Le processus traductif peut contribuer à ouvrir la langue d’arrivée à l’Autre, en y intégrant l’approche “étrangère” des choses et en la “fertilisant” à l’aide des spécificités langagières et culturelles étrangères. Pour mieux y parvenir, elle pourrait puiser dans ses propres avatars culturels, géographiques ou temporels d’une part, et de l’autre avoir recours à l’éclatement créatif de ses structures. Le traducteur produirait alors une “langue troisième”, située à mi-chemin entre les deux cultures ainsi mariées dans un même texte : celui de la traduction.
Mots-clés : traduction littéraire, sourcier, cibliste, ouverture, Walter Benjamin, Jean-René Ladmiral, connaissance passive, langue troisième